L’école Réinventée - Salman Kahn

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Dans un contexte de suppression des notes à l’école, le livre de Salman Kahn -the One World Schoolhouse – Education Reimagined en version originale-  recèle finalement une forme de cruauté à l’égard de notre système tant il met en exergue le peu d’importance de ces enjeux par rapport à d’autres qui le sont d’autant plus. En quelques 350 pages, Salman détruit méthodiquement le système scolaire américain et finalement nombre de ses semblables, dont évidemment le nôtre. Au travers de formulations typiquement américaines de recherche apparente de consensus, Salman n’en érige pas moins une pensée d’une violence rare à l’égard des systèmes éducatifs actuels -injustes, inégaux, ennuyeux et peu efficaces. Ses piques sont si précises, si documentés par l’expérience, qu’il est difficile de les contrer. Il rappelle que ce ne sont pas les notes, le nombre de professeurs, ou toutes ces litanies de poncifs que l’on ne cesse de brandir en France comme des Graals éducatifs qui sont réellement impactants. Ainsi de la taille des classes : quelle importante peu bien avoir la taille d’une classe si c’est pour n’y effectuer que des cours en format magistral comme trop souvent dans nos écoles? On en sursaute presque tant cela parle d’évidence.

Salman insiste en revanche sur quelques notions qu’il a “découvert au cours de son périple éducatif”. Ainsi de l’éducation inversée qui consiste à valider les savoir en classe -et en compagnie du professeur qui peut donc aider les élèves qui butent- et à aborder de nouveaux savoirs chez soi ou en autonomie c’est à dire sans professeur ; de même concernant son outil d’exercice numérique, qui permet d’individualiser l’interaction avec chaque élève.

Salman semble d’ailleurs bien en phase avec Andreas Schleicher, le directeur de PISA qui a une fois déclarée “sans données, vous n’êtes jusque qu’un individu avec un opinion” et souligne combien l’expérimentation, la plus scientifique possible est déterminante dans la mise en place de nouveaux modèles éducatifs. Selon Salman, il n’y a pas de modèle idéal, et il n’y a pas de contexte standard. Il n’y a que des cas plus ou moins adaptables. Mais il n’en tient pas moins une ligne dure en faveur de protocoles éducatifs permettant de suivre littéralement les élèves de façon individualisée, de systèmes de monitoring des progrès de ceux-ci, des bienfaits de la collaboration (entre élèves) et de nombreuses autres notions dont il a validé l’expérimentation, parfois à grande échelle par l’intermédiaire de sa plateforme, la Kahn Academy.

On referme ce livre avec un sentiment finalement ambivalent : il n’y aurait pas de fatalité, mais les systèmes éducatifs ne sont finalement pas toujours enclins à la réforme. Salman ne renierait sans doute pas une autre déclaration de ce même directeur de PISA : “réformer l’éducation est comme vouloir déplacer des cimetières : vous ne pouvez compter sur les gens qui s’y trouvent”. C’est terrible, mais pour quiconque a eu l’opportunité de discuter de ces sujets avec un corps d’inspection, c’est terriblement vrai aussi.

LivreSec Babgi