Le Tsunami Numérique – Emmanuel Davidenkoff

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Disons le d’emblée, j’ai adoré ce livre. Son éditeur avait eu la gentillesse de m’en faire passer un exemplaire lors de sa sortie et j’avais remis sa lecture à plus tard, ce qui vient d’être fait. Le commentaire d’ensemble est qu’il s’agit du meilleur ouvrage que je connaisse pour ouvrir les shakras éducatifs. D’une part parce qu’il fourmille de détails et évoque tout un tas de petites notions essentielles : l’importance de la mesure de la performance éducative, -Evidence Based Education- la prise en compte de l’environnement social et économique, l’éducation inversée, etc. D’autre part parce qu’il développe une thèse que je partage largement : la France se contente finalement d’une éducation délabrée car cela n’empêche aucunement l’oligarchie de ce pays de se reproduire, avec ses lycées Henri IV, Stanislas et autres qui définissent un périmètre réservé à l’élite et à la reproduction sociale. Davidenkoff partage avec moi l’idée que si  ces écoles haut de gamme disfonctionnaient, la probabilité d’une réforme serait quasi-absolue. D’autres notions sont également très bien évoquées, dont l’une que j’avais moi même constatée : les profs sont généralement de bonne volonté, mais mal formés (et surtout jamais re-formés au cours de quarante ans de carrière) tandis que c’est surtout l’encadrement qui disfonctionne… Et l’irritation du corps enseignant lorsque l’on parle de réforme vient plus du fait qu’il a été malmené des années durant (le revenu des enseignants en PPA s’est notablement effondré) que d’un conservatisme trop souvent supposé. A ce titre, l’auteur explique très bien les raisons qui justifient les échecs de toutes les tentatives de réformes jusqu’à celle de Peillon, qui était en cours lors de l’écriture de cet ouvrage.

En passant, Davidenkoff règle leurs comptes aux politiques actuellement en vigueur au sein de l’Education Nationale ainsi qu’aux acteurs corporatistes trop présents : UNEF, SNES et FSU en prennent généreusement pour leurs grades. Aucune langue de bois donc et la conclusion qu’il développe au travers d’une comparaison avec Kodak, qui se pensait éternel pour avoir inventé la photographie de masse, est cruelle mais combien pertinente. Tant d’innovations pédagogiques, de processus innovants qui restent totalement ignorés, finissent en réalité par affaiblir et menacer la pérennité de l’institution scolaire.

Ce livre amène par ailleurs des idées neuves autant qu’intéressantes : ainsi du lien entre startup et éducation, que je pressentais intéressant sans trop savoir pour quoi. Il est ainsi expliqué en quoi les processus d’organisation et de création qui ont lieu dans l’une et dans l’autre ont beaucoup en commun et peuvent bénéficier l’une de l’autre et réciproquement. Le lien entre cinéma et intérêt pour l’enseignement supérieur est également très astucieux ; de même on trouvera un très intéressant chapitre sur le design thinking et la D school, ainsi que sa transposition dont nous pourrions bénéficier à l’échelle de notre système éducatif. Le tout dans un style élégant, ce qui est loin d’être une généralité à l’égard de ce type d’ouvrage.

Pour conclure, je retrouve dans cet ouvrage nombre des idées et principes promus par Agir pour l’Ecole, l’association soutenue par l’institut Montaigne. Cela me convainc plus encore qu’il  faudrait en imposer la lecture aux futurs ministres de l’Education Nationale et, à défaut qu’ils y parviennent, nommer Davidenkoff à leur place !

Plus sérieusement, je referme ce livre avec le sentiment de m’être découvert un nouvel allié et non des moindres. Il nous faut en effet sans cesse rappeler que les grands changements dans nos sociétés humaines se font avant tout avec l’éducation que ce monde de l’éducation devra accompagner ou subir une révolution, et ce plus rapidement qu’on ne le croit généralement.

LivreSec Babgi